Trafic de passeports diplomatiques

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C’est au début du mois de septembre que le scandale sur le trafic des passeports diplomatiques éclate. La célèbre division des investigations criminelles (Dic) qui venait de mettre la main sur El ElHadji Diadji Kondé considéré comme l’un des maillons de ce scandale, allait conforter ses soupçons. El Hadji Diadji Kondé cuisiné par les limiers, passera rapidement aux aveux, impliquant du même coup des députés. Mais, auparavant en France la direction générale du renseignement intérieur (DGSI) informait d’un trafic de passeports diplomatiques dans un immeuble proche des Champs-Élysées.

Au mois de juin dernier, suite à des alertes persistantes de la Police de l’Air et des Frontières sur un probable trafic de passeports diplomatiques émis par des pays comme la Guinée Bissau, la Gambie, le Sénégal, du Congo, etc, les espions de la DGSI ont tenu à en savoir davantage. C’est ainsi sur réquisition, les policiers de la PAF mettront à leur disposition des copies de passeports diplomatiques dont les bénéficiaires étaient Fatoumata D, Kamel M., Luc S., Fouad.Z, Serkan, Mohamed.D, Sadi.W, ou Aissatou.D, etc…. Si tous parlaient le français ou l’arabe, tout indique qu’ils n’avaient pas le profil du diplomate.

Avec ces éléments d’appréciation, les espions français réussiront très rapidement à s’apercevoir qu’il s’agissait d’un trafic dont les cerveaux établis à Paris, dans un immeuble qui est situé de la rue Bassano, près des Champs-Élysées, avaient des complices dans plusieurs pays africains. Ces complices pouvaient fournir des passeports diplomatiques revendus entre 50.000 euros (32 millions Fcfa) et 200.000 euros (130 millions Fcfa) en fonction du pays d’origine et de la tête du client.

C’est le quotidien français « Libération » qui a eu vent de l’affaire, qui a contacté l’ambassadrice de la Guinée Bissau à Paris. Cette dernière a sans ambages reconnu, « J’avais connaissance de ce genre de pratiques, c’est pour ça que durant les trois années où j’ai été à la tête de l’ambassade, je me suis dit que bien des choses pouvaient être accomplies à ce sujet. Il fallait au moins mieux contrôler les pièces d’identité, j’ai fait le maximum pour arriver à contrôler la situation. Mais l’effort d’une seule personne ne suffit pas, il doit s’agir d’un effort collectif. » et de préciser, « nous ne sommes pas les seuls concernés, beaucoup de nos voisins ouest africains sont concernés mais, peut-être sont-ils plus subtils ».

Des hommes d’affaires et des repris de justice se rendaient dans une officine près des Champs-Elysées pour commander ou obtenir un passeport diplomatique de Guinée-Bissau, du Sénégal, du Congo ou de la Gambie en bonne et due forme. Du côté de Bissau, la ministre des Affaires Étrangères Susy Barbosa a démenti toute implication du gouvernement.

A peine l’affaire rendue publique le 6 juin dernier suivi du démenti de la ministre Bissau guinéenne des Affaires Étrangères,  Emballo prend quatre jours plus tard un Décret de naturalisation dont les bénéficiaires coïncident avec ceux épinglés par les Services de renseignements français. Dans la même foulée, Umaru Embalò annoncera de nouveaux passeports diplomatiques plus sécurisés. Comprend qui pourra.

Interrogé par nos soins, une source en service à la DGSI nous révèle, « Écoutez, ce qui nous intéressait c’était de voir si ces passeports diplomatiques ne profitaient pas à des personnes membres d’organisations terroristes. Après, nous rendons compte à notre hiérarchie et alertons nos collègues des pays concernés. C’est à eux de saisir les juridictions françaises d’autant plus que ces documents sont des vrais délivrés par un État ».

Si les choses ont bougé à Bissau, ça n’a pas été le cas au Sénégal où malgré l’alerte de la DGSI française et de l’Union européenne sur une circulation « incontrôlée » des passeports diplomatiques sénégalais. D’ailleurs, le Pr Ngouda Mboup a interpellé la ministre des Affaires Étrangères Aissata Tall Sall à travers un post. « La ministre des Affaires étrangères a l’obligation d’édifier les citoyens sur le scandale de trafic présumé de passeports diplomatiques qui secoue l’Assemblée nationale et certains de ses membres ». C’est l’avis du juriste Ngouda Mboup, qui déplore le mutisme de la tutelle sur ces graves accusations.

Face à ces multiples interpellations, Aïssata Tall Sall qui a été précédée à ce poste par Mankeur Ndiaye, Amadou Ba, évoque la séparation des pouvoirs pour se justifier. Ce que n’entend pas laisser prospérer Yakham MBAYE, pour qui, Aïssata TALL SALL ne doit pas évoquer le secret de l’enquête et la séparation du pouvoir pour échapper à ses responsabilités. Selon lui, « les passeports diplomatiques n’ont pas été délivrés au ministère de la Défense, c’est au ministère des Affaires étrangères ».

Avec l’installation de la commission Ad hoc chargée de se pencher sur la levée de l’immunité parlementaire des députés Boubacar Biaye et Mamadou Sall, la question est de savoir si cette affaire ne sera pas une affaire Boughazeli bis et que les vrais complices ne seront jamais connus encore moins, les responsabilités situées

Pour rappel, en 2015 déjà la DIC procédait au démantèlement d’un réseau de trafic de passeports diplomatiques. Huit personnes ont été arrêtées par la Division des investigations criminelles dans le cadre d’une enquête où le fils d’un célèbre chef religieux était le cerveau de la bande. Ce dernier revendait les passeports à 4 millions de de francs Cfa. Et c’est au Maroc que le scandale a été éventé. Fait bizarre, à l’époque des faits, Mankeur Ndiaye le ministre des Affaires étrangères avait signalé un lot de plus de 200 passeports « perdus ».

Quelques jours plus tard, six personnes détentrices de ces passeports signalés ont été interceptées à Casablanca, au Maroc. Elles voulaient rallier l’Europe. Refoulés à Dakar, les mis en cause ont été automatiquement arrêtés par la police de l’aéroport.

Interrogés, ils ont avoué avoir acheté les passeports à 4 millions chacun auprès d’un fils d’un célèbre chef religieux. Quelques jours plus tard, deux autres personnes détentrices de passeports diplomatiques faisant partie du lot des 200 disparus ont été arrêtées au Maroc et reconduites au Sénégal. Toutes les huit personnes ont été confiées à la Division des investigations criminelles (Dic) qui a hérité de l’enquête.

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