Société de l’information

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– En 1998, sur une proposition de la Tunisie, l’Union internationale des télécommunications (UIT) décide, lors de la Conférence des plénipotentiaires, d’engager un débat mondial sur la nouvelle société de l’information et ses enjeux. Le Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI) voit ainsi le jour. Il se tiendra en deux phases. La première à Genève, en décembre 2003, et la seconde à Tunis, en novembre 2005. Pour ce qui concerne l’Afrique, le Sommet fixe plusieurs objectifs qui se cristallisent tous autour de la transformation numérique du continent. Quinze ans après, le paysage numérique africain a beaucoup changé. Le continent, balloté dans un monde en évolution technologique rapide, s’accroche tant bien que mal pour suivre le rythme. Bilan, 15 années plus tard.

Accès aux services télécoms

En 2005, l’Afrique ne comptabilisait qu’un taux de pénétration de la téléphonie mobile de 15,30% pour 136 millions de connexions mobiles selon l’Association mondiale des opérateurs de téléphonie (GSMA). L’accès à Internet était encore un luxe pour une grande partie des consommateurs. Mais en 2020, dans son rapport « L’Economie mobile : Afrique Subsaharienne 2020 », l’Association indique que le continent comptait déjà plus de 477 millions d’abonnés à la téléphonie mobile. Soit un taux de pénétration de 45% de la population. Il devrait atteindre 50% d’ici 2025, pour 616 millions d’abonnés. Le nombre d’internautes se situait à 272 millions de personnes pour un taux de pénétration de 26%.

 Afrique numeÌrique

Le smartphone représente 44% des 272 millions de personnes connectées à Internet

Les smartphones qui étaient encore quasi-inexistant sur le continent il y a vingt ans représentaient déjà 44% du nombre total des connexions aux réseaux télécoms. Bien que la 2G demeure encore la technologie mobile la plus utilisée, soit près de 50% des connexions mobiles, elle est en passe de se faire supplanter par la 3G qui représente de 40% des connexions mobiles. La 4G ne représentent encore que près de 10% alors que la 5G éclot. L’Afrique est aujourd’hui connectée à plus d’une quinzaine de câbles sous-marins de fibre optique et près de 150 000 km de fibre optique maillent le continent.

Bien que la 2G demeure encore la technologie mobile la plus utilisée, soit près de 50% des connexions mobiles, elle est en passe de se faire supplanter par la 3G qui représente de 40% des connexions mobiles.

Selon GSMA, les technologies et services mobiles ont généré 9 % du Produit intérieur brut (PIB) en Afrique subsaharienne en 2019, soit plus de 155 milliards USD de valeur ajoutée économique. L’écosystème mobile a également soutenu directement et indirectement près de 3,8 millions d’emplois et a contribué de manière substantielle au financement du secteur public, générant 17 milliards USD de recettes fiscales. Mais près de 800 millions de personnes d’Afrique ne sont toujours pas connectées à l’Internet mobile. Alors que la pandémie de coronavirus a démontré l’importance sociale et économique d’un monde connecté, il devient plus qu’urgent pour les gouvernements africains de combler la fracture numérique.

Gouvernance numérique

La gouvernance numérique a toujours été l’une des préoccupations majeures du Sommet mondial de la société de l’information. L’amélioration de l’accès des populations à l’information publique, aux services publics, grâce aux TIC devait apporter de la transparence dans la gestion publique et contribuer au développement.

La gouvernance numérique doit apporter de la transparence dans la gestion publique.

Dans les pays développés, les TIC ont joué un rôle essentiel dans la promotion de la santé et de la sécurité des personnes et dans le maintien du bon fonctionnement des économies et des sociétés pendant la crise du Covid-19. « Les technologies gouvernementales numériques, grâce au partage d’informations et à la fourniture de services en ligne, ont permis aux gouvernements et aux populations de rester connectés pendant l’épidémie. Les technologies numériques ont également permis aux gouvernements de prendre des décisions politiques rapides sur la base de données et d’analyses en temps réel, de renforcer les capacités des autorités locales pour une meilleure coordination et de déployer des services fondés sur des données factuelles pour ceux qui en ont le plus besoin », a affirmé le département des affaires économiques et sociales des Nations Unies dans son rapport «E-Government Survey 2020 Digital Government in the Decade of Action for Sustainable Development ».

En Afrique, des progrès ont été enregistrées en matière d’e-gouvernement par rapport aux années passées. Le continent enregistre désormais huit pays parmi les nations du globe avec un fort indice de préparation à l’e-gouvernement. Il s’agit de la Namibie, du Cap-Vert, de l’Egypte, du Gabon, du Botswana, du Kenya, de l’Algérie et chose surprenante, du Zimbabwe.

Le continent enregistre désormais huit pays parmi les nations du globe avec un fort indice de préparation à l’e-gouvernement. Il s’agit de la Namibie, du Cap-Vert, de l’Egypte, du Gabon, du Botswana, du Kenya, de l’Algérie et chose surprenante, du Zimbabwe.

Trente-trois pays figurent dans le groupe des nations avec un indice moyen de préparation à l’e-gouvernement. Parmi eux l’on retrouve les Comores, Djibouti, la Guinée Equatoriale, la Guinée, le Mali, la Mauritanie ou encore le Soudan. Huit pays demeurent parmi les retardataires. Il s’agit de la République centrafricaine, du Tchad, de l’Erythrée, de la Guinée-Bissau, du Niger, de la Somalie et du Soudan du Sud. Bien que d’énormes progrès aient été réalisés, ils ne suffisent pas encore à permettre une quatrième révolution industrielle réussie pour l’ensemble du continent. De nombreuses améliorations sont encore à prendre en compte, notamment la sécurité informatique et l’identification des citoyens.

Liberté d’expression

Paradoxalement à l’avancée de l’Internet en Afrique, préconisée en 2005 par le SMSI, la liberté d’expression a reculé. Dans son rapport sur les « Tendances mondiales en matière de liberté d’expression et de développement des médias », publié en 2018, l’Unesco déplorait le fait que la majorité des États de la planète recourent de plus en plus à des mesures visant à perturber l’accès aux contenus médiatiques en ligne, malgré les dispositions légales prises par les plus hautes instances pour garantir la liberté d’expression et celle des médias – notamment la résolution adoptée en 2016 par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies qui « condamne sans équivoque les mesures qui visent à empêcher ou à perturber délibérément l’accès à l’information ou la diffusion d’informations en ligne, en violation du droit international des droits de l’homme ». L’organisation considérait d’ailleurs l’Afrique comme l’une des régions du monde où ces mesures de filtrage sont en nette augmentation. Elles se traduisent de diverses manières, en fonction des gouvernements. Blocages de l’accès à Internet et aux réseaux sociaux, taxation des applications Over-The-Top (OTT). Au cours des cinq dernières années, vingt-deux pays d’Afrique se sont illustrés par leur atteinte à l’accès à Internet, rapportait la Collaboration sur la politique internationale des TIC en Afrique orientale et australe (CIPESA) dans un rapport publié en février 2019.

Il faut toutefois reconnaître qu’il y a 15 ans, le SMSI ignorait les techniques de manipulation des populations via les réseaux sociaux et les scandales liés aux utilisations abusives des données personnelles.

Compétences numériques

Selon la Société financière internationale (SFI), il existe une forte demande de compétences numériques en Afrique subsaharienne.

230 millions d’emplois nécessiteront des compétences numériques d’ici 2030 en Afrique subsaharienne.

Dans son étude « Digital Skills in Sub-Saharan Africa Spotlight on Ghana » réalisée entre septembre 2018 et janvier 2019, la SFI, branche de la Banque mondiale consacrée aux investissements dans le secteur privé, explique que cette forte demande s’explique aujourd’hui par une croissance économique latente ainsi que par la numérisation et l’automatisation des divers secteurs économiques. Les compétences de base, y compris la recherche sur le web et l’utilisation de logiciels de base, sont les plus demandées. Certaines compétences intermédiaires et avancées sont également une priorité, comme le marketing numérique et l’intelligence artificielle. La SFI estime que la demande de compétences numériques devrait croître à un rythme plus rapide dans la région que sur d’autres marchés mondiaux. Mais il y a de sérieux risques que cette demande ne puisse être satisfaite car la disponibilité de compétences numériques est plus faible en Afrique subsaharienne que sur d’autres marchés et des lacunes importantes sont enregistrées dans l’offre africaine de compétences intermédiaires et avancées.

La SFI estime que la demande de compétences numériques devrait croître à un rythme plus rapide dans la région que sur d’autres marchés mondiaux. Mais il y a de sérieux risques que cette demande ne puisse être satisfaite car la disponibilité de compétences numériques est plus faible en Afrique subsaharienne que sur d’autres marchés

Les systèmes éducatifs africains « doivent se réformer ou risquer de ne pas fournir de compétences pour l’avenir. Il y a des changements nécessaires dans quoi, comment et quand les gens apprennent. L’Afrique subsaharienne doit adopter ces changements dans l’éducation », préconise la SFI qui souligne que plus de 230 millions d’emplois nécessiteront des compétences numériques d’ici 2030 en Afrique subsaharienne.

Dans son rapport « Cisco Global Digital Readiness Index 2019 » l’entreprise américaine d’informatique Cisco, affirmait que « la technologie peut aider à résoudre les problèmes les plus urgents du monde. Il peut connecter les gouvernements à leurs citoyens et leur donner accès à de nouvelles formes d’éducation et de soins de santé. Dans tous les coins du monde, la technologie numérique nous aide à devenir plus connectés les uns aux autres, et aux organisations sur lesquelles nous comptons, à ouvrir les marchés et à créer de nouvelles opportunités d’emploi ». Elle rappelait cependant que « ces avantages ne peuvent être obtenus que grâce à une planification concertée et à des investissements du secteur public et privé ».

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