Marché du tapin à Dakar : Ça carbure à plein régime
Elles ont entre 20 et 30 ans. Mami, 20 ans ; Arame, 22 ans ; Viviane, 30 ans, font un drôle de métier. Ce sont des filles de la rue. Une expression plus acceptable pour parler des prostituées. Elles ont accepté de nous parler. Leur train-train quotidien dans la rue, avec les risques, le calvaire, mais également les efforts pour arrêter. Portraits sans réserve de trois belles de nuit qui valsent au gré de l’offre entre le centre-ville, les Sicap et la moyenne banlieue ..
« J’étais élève en classe de seconde L1, dans un établissement privé de la place. Puis, mon père commerçant, a fait la connaissance d’une femme, de loin son aînée. Plus rien ne sera plus comme avant à la maison. Ma marâtre est allée jusqu’à soupçonner mon père d’avoir eu des relations incestueuses avec moi, tout simplement parce qu’il y avait entre nous, quelque chose de très fort.. ». Pour fuir les mauvais traitements et autres humiliations infligés par sa belle-mère, elle va décider de quitter le cocon familial pour, tel un papillon, voler de ses propres ailes.. Du haut de ses 22 ans, Arame parle de la rue comme une experte. Signe incontestable qu’elle a plus d’expérience dans ce domaine que sa camarade Mami : « La rue, vous savez, une fois que vous avez commencé à la fréquenter, elle vous happe. C’est un cercle vicieux duquel on a du mal à sortir. » Une réalité que confirme Viviane, 30 ans, dont plus de cinq ans passés à faire le tapin. « Je ne pensais jamais être encore dans la rue aujourd’hui. Je me disais que je vais le faire un temps puis arrêter. Je me rends compte que c’est pratiquement impossible aujourd’hui. »
Le risque est très grand
Fréquenter la rue comme activité pécuniaire ne se fait pas sans risque. « A l’âge de 19 ans, j’ai connu mon premier amour. C’était un homme de tenue », avant de préciser que le gars l’a pressée comme un citron pour la plaquer après . La pauvre de se souvenir de la date du 25 octobre 2010 qu’elle « n’oubliera jamais ».. J’avais rendez-vous ce jour avec une personnalité importante de la République. Ce monsieur a commencé par me demander de lui faire des choses que je n’avais jamais essayées. J’ai évidemment refusé. Mais il a commencé à m’appeler pute. Au beau milieu de la nuit, je me suis rhabillée et je suis sortie de la chambre. Les risques du métier, Arame et Viviane les côtoient tous les jours dans la rue mais à force de tapiner, elles ont acquiert un caractère qui les aident à se défendre contre les agressions et autres provocations.
Abandonner le trottoir
Toutes ces raisons et bien d’autres encore, amènent Mami, Arame et Viviane, à déserter le trottoir. Une fille de 20 ans comme moi, je n’ai pas d’amis. Quand je rentre à la maison après le travail, je me retrouve seule. La musique est ma meilleure compagne. Avec la grâce de dieu, j’espère vraiment changer de vie au plus tard à la fin de l’année. », insiste t-elle. Et Arame de poursuivre : « La vie dans la rue ce n’est pas une vie. Nous prions Dieu pour qu’il étende sa main toute puissante et nous tire de là. Vous savez, on choisit rarement d’être une prostituée. C’est tellement avilissant, dégradant, déshumanisant. La vie dans la rue, c’es une vie à problèmes, de débauche et de vices », conclut la jeune femme.
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